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Des gènes synthétiques dans les plantes alimentaires

Le Professeur Joe Cummins explique pourquoi les gènes insérés dans les plantes cultivées génétiquement modifiées et destinées à un usage alimentaire, ne sont pas "équivalentes en substance" aux gènes existant à l'état naturel, sans modifications génétiques.

Le texte original en anglais et les références sont accessibles sur le web par : https://www.i-sis.org.uk/sgigmc.php

En Amérique du Nord, des aliments issus de plantes génétiquement modifiées, non étiquetées et n'ayant pas fait l'objet d'expérimentations préalables, prennent leur place dans l'approvisionnement en produits alimentaires. De tels aliments sont diffusés à partir d'une vision erronée et fictive qui considère que des gènes étrangers – extraits généralement de bactéries et de virus – puis insérés dans des plantes par les méthodes et techniques du génie génétique, sont "essentiellement équivalents" aux gènes normaux, existant à l'état naturel, sans modifications génétiques.

En réalité, les gènes utilisés pour créer des plantes génétiquement modifiées sont des approximations synthétiques des gènes normaux. Ils contiennent des séquences synthétiques d'ADN mises au point pour maximiser la production des protéines étrangères dans la plante, telles que des toxines tuant des insectes ou des enzymes dégradant des herbicides, ce qui assure également la protection par brevet sur les plantes ainsi génétiquement modifiées. Des gènes synthétiques sont employés parce que les gènes activement exprimés chez des bactéries ou chez des êtres humains ne sont pas très efficients lorsqu'ils se trouvent placés dans des espèces de plantes cultivées. Il y a plusieurs manières de résoudre technologiquement le problème.

1. La première façon consiste à ajuster les séquences d'ADN de façon à les rendre conformes et convenables à l'espèce de plante cultivée dans laquelle des gènes des bactéries ou des mammifères sont insérés.

Le code génétique se compose de 64 combinaisons de trois bases nucléiques, dénommées codons ou triplets, qui sont capables de synthétiser vingt acides aminés – qui vont constituer des protéines - plus des combinaisons de début et d'arrêt de la traduction. Certains acides aminés tels que la méthionine (met) et le tryptophane (tryp) ont seulement un codon, alors que l'arginine (arg), la leucine (leu) et la sérine (ser) comportent chacun ont six codons.

La préférence au niveau codons chez les êtres vivants, résulte du fait que le code de l'ADN est “dégénéré”, c'est-à-dire qu'il peut exister, pour un ensemble de trois bases nucléiques qui compose un triplet ou codon, de une jusqu'à six combinaisons de bases nuvléiques qui sont capables d'assurer la synthèse d'un aminoacide donné. Il existe, pour un type d'organisme donné, une préférence pour un triplet particulier. Les bactéries ont tendance à préférer des triplets différents de ceux qui sont communs chez les êtres humains ou les plantes. Les plantes préfèrent des triplets différents de ceux des êtres humains, et même dans différents tissus, on ne trouve pas les mêmes triplets, par exemple dans le cerveau et le foie. Les séquences d'ADN, chez des bactéries par exemple, sont mal lues chez des plantes. La fréquence d'utilisation des codons varie d'un organisme à un autre, ce qui explique pourquoi des gènes bactériens sont mal lus chez des végétaux, et vice versa. On remplace donc des séquences bactériennes originales par des séquences mieux lues chez les plantes. Il en résulte, par conséquent, que le message initial de la bactérie ne peut plus être utilisé de façon correcte chez des bactéries, après qu'il ait été altéré de façon à répondre à la préférence des plantes.

Afin d'obtenir une expression optimale des gènes, les séquences d'un transgène doivent être reformatées de manière à améliorer les performances du gène considéré. Des gènes humains utilisés pour produire des plantes à usages pharmaceutiques, par exemple l'aprotinine humaine, sont normalement reformatés de manière à répondre à la préférence du végétal ; il en résulte que bien que la plante produise une protéine qui fonctionne comme l'aprotinine humaine, le gène mis en œuvre est distinct du gène humain d'origine.

De tels gènes synthétiques devraient être étudiés de façon très détaillée car ils ne sont pas équivalents aux gènes d'origine. Ils sont des produits complètement synthétiques qui imitent le gène réel d'origine, mais ils peuvent se comporter de façon aberrante.

Le nombre de séquences génétiques possibles qui peuvent coder pour la biosynthèse d'une protéine est stupéfiant : il est estimé à environ cinq fois dix à la puissance quarante sept ou 5x10 47  [1].

Ce nombre est de l'ordre de trois fois l'ordre de grandeur du nombre d'atomes qui composent la planète Terre et cinq fois plus grand que le nombre des molécules d'eau existant sur cette même Terre [2].

Lors de la synthèse des gènes utilisés chez des plantes génétiquement modifiées, disons par exemple lors de la modification d'un gène producteur d'une protéine Cry provenant de la bactérie Bacillus thuringiensis et destiné à une plante, on utilise une table de correspondance indiquant les codons préférés par les plantes en substitution du codon normalement préféré par les bactéries [3].

Il est parfois nécessaire de choisir les séquences d'ADN et de procéder à des substitutions qui vont aboutir ainsi une modification d'un ou de plusieurs acides aminés, pour faire en sorte que la toxine Cry finale puisse fonctionner correctement dans l'environnement des cellules végétales [3, 4].

Comme les méthodes et techniques du génie génétique se sont considérablement perfectionnées, les domaines actifs essentiels et cruciaux, aboutissant à la biosynthèse des toxines et des enzymes, ont été bien définis et "améliorés", à un point tel que la protéine originale d'un organisme vivant donné est à peine reconnaissable.

Une troisième modification du transgène peut s'inscrire dans les séquences régulatrices, fréquemment désignées sous le nom des éléments cis, comme les promoteurs, les introns et les signaux de fin de transcription, qui sont habituellement puisés chez les plantes supérieures ou bien encore de leurs agents pathogènes viraux et bactériens. Des promoteurs synthétiques ont été également créés, plus ou basés sur le virus de mosaïque de chou-fleur (CaMV) qui est généralement utilisé en génie génétique.

L'utilisation des gènes synthétiques dans les plantes alimentaires n'a pas été suffisamment prise en considération dans les autorisations réglementaires qui concernent leur diffusion. Malgré les différences évidentes entre les gènes synthétiques et les gènes normaux d'origine desquels ils découlent, les responsables chargés de la réglementation ont permis, en matière de sécurité alimentaire, que les gènes et les protéines produits dans les bactéries soient considérés comme des substituts appropriés lors des évaluations des gènes synthétiques et des protéines produits par les plantes alimentaires [6]. Ceci expose au grand jour la complicité malsaine des sociétés [de biotechnologies] et des personnels chargés de la réglementation dans ce secteur [7,8].

Il semble qu'une connivence commode a été entretenue par les sociétés [de biotechnologies], par les bureaucrates des administrations et par les chercheurs du secteur public et des universités qui dépendent de moyens financiers alloués par le gouvernement et en provenance de sources privées, et qu'ainsi, des gènes bactériens soient utilisés dans des plantes alimentaires ou bien encore que des gènes humains soient employés dans des plantes productrices de substances à usage pharmaceutique. Alors qu'en fait, les gènes utilisés sont des approximations synthétiques des gènes réels. Même la justice semble avoir accepté cette fiction commode comme un fait reconnu.

La prochaine génération des plantes génétiquement modifiées évolue vers un ensemble minimal des domaines protéiques actifs qui sont fréquemment raccordés ensemble à partir d'un certain nombre de protéines différentes. Ces domaines sont un secteur actif des protéines qui servent de signaux pour activer des fonctions comme une toxicité ou une fonction enzymatique, ou encore un capteur de facteurs d'environnement pour la régulation.

Les expérimentations se rapportant à la sécurité alimentaire sont basées, de nouveau, sur des substituts irréels et les produits alimentaires dérivés ne sont pas étiquetés en vue de leur mise en marché. Ainsi, il serait difficile de tracer les subtils changements qui peuvent résulter des modifications de quelques acides aminés ou du fait des lacunes dans la mise en garde relative à des modifications secondaires des protéines (telles que le glycosylation), s'il advient que des consommateurs subissent des troubles en consommant ces produits synthétiques en provenance des plantes génétiquement modifiées.

Il est impératif que les gènes synthétiques et leurs produits soient évalués et testés de manière approfondie, non seulement pour des effets secondaires potentiellement toxiques mais également pour des caractéristiques de stabilité [génétique] et de recombinaisons éventuelles. Ces gènes synthétiques n'ont pas subi une histoire en terme d'évolution et c'est une erreur grave de supposer que ces constructions génétiques synthétiques peuvent se comporter dans tous les cas de figure comme les gènes originaux à partir desquels ils ont été bâtis.

Article first published 01/09/04


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